Mes Très Chers Frères et mes Très Chères Sœurs,
Très Chers Conseillers de l’Ordre du Grand Orient de France,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Cinq années se sont écoulées depuis l’assassinat de Samuel Paty, deux depuis celui de Dominique Bernard. Tous deux ont été frappés par le terrorisme islamiste, par le fanatisme aveugle, par cette violence obscurantiste dont le seul but est de réduire au silence la liberté de penser, imposant au monde une vision totalitaire.
La France se souvient.
Elle se souvient de ces hommes qui, par leur dévouement et leur courage, ont porté au plus haut l’idéal de l’École de la République : la passion de transmettre, la liberté d’enseigner.
Leur engagement relevait d’un profond devoir civique, l’expression d’une foi ardente en la République et en ses idéaux. Ils incarnaient l’instituteur, celui qui de salle de classe en salle de classe forge les esprits, révèle des citoyens.
Par l’enseignement de la raison, de la tolérance et de l’esprit critique, Samuel Paty et Dominique Bernard s’inscrivent dans la lignée de ces hommes et de ces femmes qui ont fait de la connaissance une victoire de l’esprit et un rempart contre l’obscurantisme.
À travers eux, c’est l’École tout entière qui s’est dressée face à la barbarie.
Leur mort a mis à nu la violence implacable de ceux qui abhorrent la Lumière et veulent réduire au silence la pensée libre. Leur mort a aussi rendu palpable la force tranquille de la Nation, une Nation rassemblée autour de son école, ce temple profane où s’instruisent la conscience citoyenne, la liberté de pensée par soi-même, la joie.
Mes très chers Frères et mes très chères Sœurs, chers amis, souvenons-nous :
C’est à la Sorbonne, au cœur de ce haut lieu de savoir et de liberté, que tant d’esprits éclairés ont façonné la pensée humaniste.
C’est sur ces mêmes terres, à deux pas de là, place Maubert, qu’en 1546 fut brûlé Étienne Dolet, imprimeur, humaniste et philosophe, coupable d’avoir affirmé le droit sacré de penser et de dire. Dolet, martyr de la pensée libre, annonçait déjà le combat de la Raison contre le fanatisme, celui que Samuel Paty et Dominique Bernard ont poursuivi cinq siècles plus tard dans les classes de la République.
Ainsi, de la flamme de Dolet consumé sur le bûcher jusqu’à celle qui éclaire les visages de nos enseignants d’aujourd’hui, c’est la même Lumière qui se transmet :
la Lumière de la connaissance, de la vérité, et de la liberté de conscience.
Cette flamme, mes très chers Frères et mes très chères Sœurs, c’est à nous aussi qu’il revient de la préserver et de la nourrir. Que brille cette flamme !
Aujourd’hui encore, alors que tant d’enseignants poursuivent leur mission avec inquiétude, notre devoir est clair : les soutenir, les défendre, les honorer.
La République doit protéger ceux qui, dans le silence des classes, la font vivre chaque jour.
Ils sont les gardiens du libre arbitre, les maçons de l’esprit, les bâtisseurs de l’avenir.
Le Grand Orient de France rend un hommage solennel à Samuel Paty et à Dominique Bernard.
Leur mémoire nous engage.
Leur mémoire nous rappelle que la liberté absolue de conscience, de croire ou de ne pas croire, et de transmettre sans peur, est la pierre angulaire de tout humanisme véritable.
Le Grand Orient de France, fidèle à sa vocation humaniste et laïque, s’inclinent devant la mémoire de ces hommes.
Nous rappelons que la liberté absolue de conscience, la liberté d’expression et la laïcité sont des piliers indissociables de notre pacte républicain.
Les défendre, c’est honorer Samuel Paty et Dominique Bernard.
Les transmettre, c’est poursuivre leur œuvre.
Mes très chers Frères et mes très chères Sœurs, en nous souvenant d’eux, en évoquant la Sorbonne et la figure d’Étienne Dolet, nous réaffirmons notre fidélité à la Lumière contre l’obscurantisme, à la Raison contre la haine.
Puissent leurs exemples nous inspirer à défendre sans relâche l’École, ce sanctuaire de l’émancipation et du savoir, ce lieu où s’élève l’esprit humain vers sa pleine dignité.
C’est à cette fidélité à l’esprit républicain, à cet idéal de liberté et de vérité, que nous devons consacrer nos forces et nos cœurs.
Car là où brille la pensée libre, là aussi brille la Lumière maçonnique.
J’ai dit.
Paris, Square Samuel Paty,
Le 16 octobre 2025,
Pierre Bertinotti
Grand Maître du Grand Orient de France