Propos d’accueil et d’introduction de Gilles Richard, Grand Maître adjoint du Grand Orient de France Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, Monsieur le Grand Maître du Grand Orient de France, Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames, Messieurs. En 1974, le Président de la République Valery Giscard d’Estaing, annonçait une révision technique de la Constitution, une « mesurette » perçue par la plupart des commentateurs politiques de l’époque comme sans grandes conséquences. Il s’avère pourtant, rétrospectivement, qu’il s’agit sans doute de l’une des réformes constitutionnelles les plus importantes, depuis l’avènement de la Véme République.
Ainsi et à l’instar des grandes démocraties, la République Française a jeté les bases d’un statut pour l’opposition parlementaire, en permettant à 60 députés ou 60 sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel afi n de vérifi er la conformité d’une loi nouvelle à la Constitution. Selon la phrase maintenant consacrée, l’opposition peut désormais avoir juridiquement raison tout en étant politiquement minoritaire. Depuis, d’autres réformes sont venues bousculer la traditionnelle « rationalisation du Parlement », c’est-à-dire la limitation des prérogatives parlementaires. De la session parlementaire unique en 1995, qui accroit de facto la durée du contrôle exercé par les chambres, à la révision de 2008 qui limite l’utilisation de l’article 49.3, c’est à dire la possibilité pour le gouvernement d’engager sa responsabilité sur un texte législatif et donc d’obtenir son adoption sans vote parlementaire, sauf motion de censure.
La fameuse question de confi ance ! Nous y sommes. Car tel est l’intitulé de votre intervention. Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, nous vous accueillons ce soir sur cette thématique et nous vous en remercions. Il est vrai que le contexte est particulièrement propice à cette réfl exion.
Vous avez, M. le Président, lancé le 20 septembre 2017 le chantier d’un « Parlement 6 de demain ». Les groupes de travail viennent, il y a quelques jours, de formuler les premières propositions marquées du sceau de l’effi cacité parlementaire. Pourtant cette préoccupation ne vous appartient pas en propre, car le pouvoir exécutif lui même appelle de ses vœux une modernisation institutionnelle, notamment du Parlement. Le président Macron, dans son discours du 3 juillet 2017 devant le Parlement réuni en Congrès, précisait : « L’esprit qui les a fait naître (… nos institutions) s’est abîmé au gré des renoncements et des mauvaises habitudes ». Les jalons sont ainsi plantés et le questionnement ouvert. S’agit-il d’une révolution copernicienne pour le Parlement, c’est à dire plus simplement d’un retour « à l’esprit qui les a fait naître » comme le disait le Président de la République.
L’attachement du chef de l’État à la notion d’effi cacité parlementaire, maître-mot du changement institutionnel de 1958, semble le confi rmer… S’agit-il au contraire d’une véritable modernisation de l’institution parlementaire, comme vous semblez l’énoncer dans votre avant propos concernant les premières propositions ? A moins qu’il ne s’agisse, pardonnez l’ironie – en même temps – de conjuguer effi cacité parlementaire et modernisation démocratique.
Le chantier est vaste, il concerne notamment le statut de l’élu longtemps annoncé et jamais mis en œuvre alors qu’il conditionne pour partie le renouvellement de la classe politique et donc à la fois l’engagement civique et le dynamisme démocratique de notre République. Ce questionnement n’est d’ailleurs pas sans risque dans le cadre de notre tradition républicaine, pour laquelle l’élu représente la Nation et non lui-même quelle que soit son appartenance religieuse, sexuelle ou ethnique. Il aborde également la question des moyens d’évaluation du Parlement. Peut-on tolérer encore que les chambres parlementaires qui votent le budget, c’est-à-dire l’acte législatif le plus important en démocratie, ne disposent pas des moyens de procéder elles-mêmes, à l’évaluation économique des mesures budgétaires proposées ainsi que de celles votées les années passées.
Autant de questions en apparence techniques et qui pourtant sont fondamentales dans le cadre d’un approfondissement démocratique de notre République, c’est-à -dire d’une modernisation du contrôle de l’action gouvernementale.